Parcours n°10 L’avenue Deschanel et ses abords

Méditative, le menton posé sur un genou,  Silke , sculpture d’Alfred Blondel, accueille le promeneur au  square Emile Duployé. Une invitation à la quiétude au carrefour des avenues Paul Deschanel et Rogier, pour contempler les façades s’affichant avec majesté aux abords  du square.

Le couronnement de l’immeuble à appartements du  N° 3 annonce son nom avec fierté : le Rose-Marie. L’horizontalité qui caractérise ces constructions de l’entre deux-guerres leur confère un aspect monumental. Le  N°130 en est un bel exemple. Marquant l’angle, cet édifice Art déco, utilise du marbre jaune au rez-de-chaussée et se distingue par l’alternance de parties saillantes et rentrantes ainsi que par une décoration géométrisante.

Suivons la prestigieuse  Avenue Paul Deschanel qui s’étire jusqu’au  square Armand Steurs. De grandes bouches d’aération circulaires nous rappellent que cet axe fut tracé au-dessus de l’ancienne ligne de chemin de fer du Luxembourg déplacée ici en 1919. Après avoir longé les colonnes torsadées de la résidence « La Marquise » au  N°160, la traversée du pont de chemin de fer nous conduit à la  rue Monrose. En 1928 l’architecte Hubert Eggerickx y construit plusieurs maisons de style Art déco, entre les N°47 et 51. La disposition irrégulière des briques donne vie à ces façades percées de deux logettes triangulaires. En 1930, l’architecte Deboodt édifie au  N°33 l’atelier abritant les maîtres verriers Colpaert. Cet atelier est évoqué dans la promenade  N°4.

Revenons maintenant sur nos pas. La deuxième partie de la  rue Monroase propose de multiples éléments  patrimoniaux. Au  N°52, les ferronneries de la porte d’entrée participent à l’élégance de l’ensemble, avec un bémol cependant pour la porte de garage qui brise la cohérence de la construction. René Doom déploie en 1913 un décor de feuillages dans les maisons jumelles des N°62 et 64.  Depuis le sommet, un hibou observe le passant tandis qu’une chouette nous accueille à la maison voisine (Arch. P. Cam- bier et J. Des Touches) où se décline un véritable bestiaire fait de toiles d’araignées et d’abeilles : une ornementation très particulière pour ces maisons élevées pour la plupart après la 1ère guerre mondiale. Place à la rose au N°68, représentée dans les petits vitraux ou décorant la console qui soutient le bow-window. Richard Culliford, père de Peyo, le dessinateur des schtroumpfs, commande en 1929 au même duo d’architectes Pierre Cambier et Jean Des Touches l’habitation du  N°74. L’Art déco s’y décline dans les châssis d’époque ornés de vitraux colorés. Avez-vous observé les oiseaux qui pullulent dans la façade ?

Retrouvons à présent l’avenue P.Deschanel. Elle révèle dans sa dernière partie schaerbeekoise de superbes immeubles à appartements, parmi lesquels les résidences Reine Astrid  au  N°248 et Steurs aux N°254-256. Ces  élévations nous rappellent l’intérêt naissant de la bourgeoisie pour la vie en appartement dans les années trente.

C’est une tête de satyre qui orne l’entrée principale du N°257, que l’on admire de l’autre côté de l’avenue. Allure majestueuse que celle de cet immeuble de style Beaux-arts qui séduit par son équilibre chromatique, alliant le blanc et le rouge, ainsi que par le balcon qui couvre toute la largeur.

Il est difficile d’imaginer, en revenant vers la  rue de la Consolation, qu’un étang du Maelbeek, agrémenté de roseaux, s’y logeait autrefois. Ainsi la rue fut appelée ‘t Rooststraat , et devint au fil du temps  Trooststraat . En 1907, l’architecte Gustave Strauven, élève de Victor Horta, y construit au  N°67 une maison largement décorée de sgraffites à la ligne nerveuse.

Paul Hamesse, adepte du style Art nouveau géométrique, érige au  N°7 de la  rue Albert De Latour, en 1903, une maison unifamiliale. Les trois lignes soulignant sa signature se répètent en écho sur la façade élégante et sobre. Trois ans plus tard, Hamesse réalise le  N°100 de la rue de la Consolation : on peut espérer que la restauration en cours lui rendra son intérêt patrimonial.

A hauteur de l’angle aigu formé par la  Rue Fuss et l’avenue Clays, l’architecte Verwacht s’inspire largement du style paquebot dans cet immeuble à appartements des années 30.

Est-ce un pic-vert qui anime l’ouvre-porte de la maison de maître néo-renaissante au  N° 15 de la rue Fuss ? Son pignon en escalier, sa tourelle et ses fenêtres étroites nous transportent dans un autre temps.

Les N° 32 et 34 de la  rue Van Hasselt constituent une perle architecturale schaerbeekoise construite par Gaspard Devalck. L’Art nouveau s’y affirme avec force dans toute sa richesse décorative : vitraux avec héron, lever de soleil et envol d’oiseaux, logette en bois surmontée d’un petit  balcon et déclinaison de ferronneries rappelant la roue d’un paon !
En face, au  N°39, une inscription rappelle le passage en cette demeure du peintre surréaliste Marcel Marien, ami de René Magritte. En remontant la rue, nos pas nous conduisent dans l’artère commémorant Thomas Vinçotte, l’un de nos grands sculpteurs belges, auteur notamment du quadrige couronnant l’arcade du Cinquantenaire. Après être passés devant le  N°15 avec son amusante  loggia, nous longeons la maison de repos avant de  prendre à droite.

Le premier tronçon de la  rue Verbist marque la limite de la commune de Schaerbeek. Cette artère, dont le nom rappelle un ancien bourgmestre tennoodois, est située dans l’axe du campanile de l’église de Saint-Josse. La restauration récente du  N°121 permet un nouveau regard sur l’équilibre qui émane de cette façade. Les motifs de profils féminins que l’on devine dans les sgraffites nous laissent penser que Paul Cauchie prit part à la décoration de cette maison éclectique de 1910.
De retour dans la rue Thomas Vinçotte, jetons un œil au N°42 , avec son air de villa campagnarde. Datant de 1885, elle fut habitée jadis par le peintre Herman Richir, portraitiste de renom.

La  rue Artan rend hommage au baron Louis Artan de Saint Martin, considéré comme un de nos plus grands peintres de marines au 19ème  siècle. La promenade nous donne l’occasion de découvrir quelques beaux éléments de petit patrimoine : le sgraffite du  N° 146 ou les belles portes d’entrée ouvragées des  N°142 à 138. Surprenantes car nichées en intérieur d’ilot, d’anciennes écuries rénovées ont été converties en centre de marketing et restaurant au N°118B.  Au N°111, vous reconnaitrez le graphisme de Paul Cauchie dans de petits profils féminins entourés de guirlandes de roses.

L’avenue Clays est le théâtre d’un intéressant alignement de maisons à pignons précédées de petits jardins. Parmi ces élévations éclectiques, on remarque particulièrement deux réalisations signées Gustave Strauven aux N°47 et 49. Construites en 1902, ces jumelles sont originales dans la disposition des terrasses réparties de part et d’autre du petit bow-window triangulaire du 1er étage, qui supporte à son tour une terrasse en triangle. Formes complexes, variétés de matériaux, briques peintes en rouge... on reconnaît le talent de l’architecte.