Archive : Le cimetière de Schaerbeek

Une archive à la loupe

La commune a connu plusieurs cimetières au cours des siècles. Découvrez ici leur histoire et plus particulièrement un projet établi en 1934 par l’architecte communal, Fernand Delbrassine, mais qui ne sera finalement pas réalisé.

Le cimetière de Terdelt

Le cimetière autour de l’église Saint Servais, devenu trop exigu, est déplacé dans les années 1860 afin de laisser la possibilité d’une nouvelle urbanisation à Schaerbeek. En 1866, le nouveau cimetière situé à proximité de la chaussée d’Haecht, dans le quartier Terdelt (rue Godefroid Guffens) est enfin programmé. En 1873, il est déjà agrandi, puis en 1883 et encore en 1898. Les extensions du cimetière communal suivent la courbe démographique de la commune, toujours croissante.

Une crypte sous le Monument aux soldats morts pour la Patrie

En 1880, afin de pallier au manque de places dans le cimetière, on parle déjà de la création de galerie funéraire à l’instar d’autres communes bruxelloises.  Ce projet est abandonné, mais, après la Première guerre mondiale, il ressurgit en vue d’ériger un monument commémoratif dédié aux soldats décédés durant la Grande Guerre. L’architecte communal, Auguste Paillet, signe les plans en 1919, suivis de ceux relatifs à l’agrandissement de ces galeries en 1922. Un concours est organisé pour le couronnement de la galerie, le jury sélectionnera le projet de Mathieu Desmaré.

À la recherche d’un nouveau terrain

Dès janvier 1920, il est urgent d’agrandir le cimetière, et le Collège décide alors de son déplacement. Un premier travail consiste en la recherche d’un terrain, et le choix se porte sur un espace situé sur les communes d’Evere et de Woluwé-Saint-Etienne. Ensuite, il a fallu procéder à l’acquisition ; achats et expropriations de plus de 200 terrains de propriétaires différents, ce qui a pris presque 20 ans. La commune de Schaerbeek acquiert un terrain de près de 35 ha de forme approximativement triangulaire en vue d’y implanter son nouveau cimetière.

Un premier projet d’aménagement

Dans un rapport (non signé, non daté), sans doute rédigé par l’architecte communal Fernand Delbrassine, est mentionné l’importance de faire appel à un « architecte-paysagiste » pour ce type de travail. On y trouve alors le nom de François Dumileu, un rocailleur français actif à Bruxelles depuis 1896 et qui a participé à l’aménagement du parc Josaphat. Delbrassine fait une description de ses propositions, (malheureusement nous n’en avons aucun dessin) et il commente :

Nous y trouvons deux allées principales partant des deux entrées extrêmes et aboutissant à un rond-point central entouré d’une triple rangée de concessions formant une pelouse d’honneur. L’installation dans ce rond-point d’une estrade avec balustrade (excèdre) permettant une cérémonie avec discours, etc… Derrière des massifs d’arbres et d’arbustes […], une pelouse spéciale est réservée aux combattants. Enfin, sur tout le pourtour, une rangée de peupliers et de sapins ferme l’écran pour les habitants des avenues en bordure. Le revêtement des chemins sera en dolomies ou en mortier asphaltique, l’allée principale en béton. Une pépinière est créée dans le terrain disponible. 

Pour terminer, Delbrassine pose différentes questions, ces trois questions nous semblent très intéressantes et reflètent les préoccupations de l’époque : « faut-il un emplacement pour un four crématoire ? faut-il prévoir une crypte le long du mur du cimetière de Bruxelles ? faut-il envisager une entrée dans son mur ? ». La Belgique autorise l’incinération en 1932 et le premier centre d’incinération sera construit cette même année à Uccle. Quant à la crypte, faisant référence à celle construite sur l’ancien cimetière, elle reste un atout majeur lors de la création de ce nouveau cimetière. Une entrée par le cimetière mitoyen de Bruxelles, renforce l’idée d’une « cité des morts » de près de 70 ha, comme on peut le lire dans un autre document.

Le plan de Fernand Delbrassine

Un magnifique plan a été retrouvé dans les archives communales, ce plan aquarellé dans les tons verts précise les intentions de ce nouveau projet. Réalisé par Delbrassine, il reprend de nombreuses idées de Dumilieu. Aucun texte ne précise ce dessin, aucune autre précision n’est signalée. Aucun nom d’arbres n’est mentionné.

Nous entrons par une allée majestueuse bordée d’une double rangée d’arbres et au-delà quelques « sépultures de luxe » selon le terme précisé sur le plan. Cette avenue principale donne sur un hémicycle où sont disposées des « tombes d’honneur » dont celles de soldats de la guerre 14-18 et où un « monument pour cérémonies » y prend place. L’hémicycle est lui-même entouré d’une double allée d’arbres. Cette partie principale est encadrée par des allées de forme triangulaire dont un côté est mitoyen du cimetière de Bruxelles, elles aussi bordées d’une double rangée d’arbres.

Un second hémicycle avec crypte est proposé dans une seconde partie plus à l’est (à gauche du dessin). Les allées forment dans cette partie de larges courbes et diffèrent sensiblement de la partie principale où le triangle et les formes géométriques organisent l’espace. Cette fois, son centre est un espace gazonné. Une pépinière est également prévue.

Le petit croquis noir et blanc de profil permet de mieux visualiser l’avenue principale, une route carrossable bordée d’arbres, voitures et piétons y sont dessinés.

Une grande partie reste non utilisée, en effet des discussions concernant la superficie du cimetière sont alors menées.

Épilogue

Ce projet tombe dans les oubliettes de l’histoire car, en juillet 1937 un arrêté royal, suivi d’un second en mai 1939, autorise l’expropriation de l’entièreté de ce terrain communal en vue d’agrandir l’aérodrome de Bruxelles-Haeren. La commune essaye par tous les moyens de ne pas céder son bien si laborieusement acquis, mais la guerre approche, et leur projet d’un cimetière s’évapore.

Ce n’est qu’après la guerre que la commune, suite à de nombreuses démarches, pourra le récupérer. Au début des années ’50,  elle pourra enfin se remettre à la tâche et confie ce travail à l’architecte-paysager René Pechère.

L’aspect paysager s’inscrit dans la lignée des cimetières-parcs. Les allées sont bordées d’arbustes et d’arbres choisis avec discernement, empêchant toutes vues vers les monuments funéraires. Quant aux parcelles, elles sont délimitées par des arbustes ou des arbres qui ferment ces espaces. Les haies de ligustrum, d’une hauteur d’un mètre, se dressent derrière les stèles disposées dos à dos mettant ainsi en valeur les monuments funéraires.

Vous souhaitez en savoir plus ? Contacter le service des Archives communales : (info@1030.be)

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