2024

Composition du jury

  • Gratienne Dubois, responsable du service pédagogie et médiation au Civa
  • Alice Graas, coordinatrice de la stratégie Art nouveau de la Région de Bruxelles-Capitale pour Patrimoine & Culture
  • Thomas Greck, architecte
  • Benjamin Zurstrassen, conservateur du musée Horta

Les lauréats

Pour la catégorie « particuliers » / restauration », le jury a décidé d’accorder :

  • 1er prix, d’une valeur de 2600 €, à la restauration d’un plafond polychrome dans une maison de type néoclassique construite en 1894, chaussée de Haecht 268 - propriétaires : Sophie Chamart et Quentin Crabbé
  • 1ère Mention ex aequo, à Schaerbook – restauration d’une devanture Art Déco, avenue Léon Mahillon 91 - propriétaires : Christine Otten, Laurent Swinnens et Laurence Collignon
  • 1ère Mention ex aequo, à « Maréchal Foch s’éveille – restauration de façade », avenue Maréchal Foch 31 - propriétaires : Aurore Burette et Hadrien Bourdon

Pour la catégorie associations / projet de sensibilisation, le jury a décidé d’accorder :

  • 1er Prix, d’une valeur de 1000 € à l’association ARAU – Atelier de recherches et d’actions urbaine pour la Carte exploratoire « Habiter Schaerbeek »

Catégorie : Privés à l'origine de travaux exemplaires de rénovation ou restauration

1er Prix : restauration d’un plafond polychrome dans une maison de type néoclassique construite en 1894

Chaussée de Haecht 268
Maîtres d’ouvrage : Sophie Chamart et Quentin Crabbé

Le lieu :
Voisine de la Maison Autrique, cette maison bourgeoise de style néoclassique construite en 1894 fait partie d'une enfilade cohérente d'immeubles pour la plupart de style néoclassique.

La restauration :
Au fil du temps et des propriétaires successifs, la maison s’était retrouvée affublée de nombreuses annexes et se trouvait à la limite de l’insalubrité lorsqu’elle a été acquise en 2018 par ses propriétaires actuels. Ils ont entrepris sa rénovation de manière à la rendre à nouveau habitable et confortable, tout en essayant de conserver au mieux les éléments de patrimoine qui pouvaient l’être.

À l’issue des travaux de gros-œuvre, en 2021, alors qu’ils s’apprêtaient à mettre une couche de peinture avant d’emménager, les propriétaires se sont aperçus en ponçant le plafond de leur salon que se retrouvaient par endroit des motifs polychromes. Ils ont alors décidé de ne pas poursuivre la mise en peinture de ce plafond dans l’espoir de pouvoir le restaurer plus tard. C’est en 2023, en discutant avec des artisans du patrimoine, que le nom de Manuel-Antoine Cardoso Canelas leur a été recommandé. Le chantier a démarré fin juin 2024 et a duré 3 semaines.

L’intention initiale était de faire quelques sondages pour dégager les motifs et les couleurs du plafond. Ceux-ci devaient permettre la création de poncifs permettant de recréer le décor d’origine. Les sondages ont cependant révélé des motifs plus travaillés et variés que ce qui était attendu, et les propriétaires ont finalement opté pour un dégagement des décors d’époque et une remise en peinture de la corniche et de l’aplat uni.

Les parties dégagées ont été nettoyées, et des corrections ont été effectuées à l’aquarelle aux endroits abimés. La corniche a été remise en peinture, avec une première couche rouge sang permettant d’apporter de la profondeur, puis une patine bordeaux s’accordant avec la teinte des marbres de la cheminée. Un traitement similaire a été appliqué pour la rosace centrale. C’est l’aplat central, bien qu’en apparence très simple, qui a posé le plus grand défi : les sondages ont révélé qu’il était à l’origine probablement bleu ciel, mais la peinture à l’huile s’était oxydée et est devenue verte. Une sous-couche bleu clair a donc été appliquée, suivie par une patine verte. L’oxydation de la couleur du fond n’ayant pas été uniforme, la difficulté principale a été de parvenir à effectuer des raccords harmonieux puisque le vert des dégagements de chaque angle était différent.

Le plafond restauré présente quatre coupes évoquant probablement les quatre saisons, entourées de feuilles d’acanthes et reliées par des frises au pochoir.

Artisan impliqué dans le projet : Manuel-Antoine Cardoso Canelas

Le point de vue du jury :
Ce projet est situé à l’intérieur et cette restauration ne s’adresse pas à la collectivité, cela aurait pu être un frein pour certains membres du jury. Cependant, le fait justement que les propriétaires n’étaient pas tenus de faire cette restitution rend cette intervention encore plus intéressante. Il n’existe plus beaucoup de ces interventions polychromes, l’idée de conserver ce décor est donc louable. Les propriétaires ont pu s’encadrer des bonnes personnes pour définir une méthodologie et restituer le décor de manière nuancée. Cette restitution voisine bien avec une intervention contemporaine, ce qui est rare. C’est un exercice qui n’est pas facile, peu de gens le font.


Chaussée de Haecht 268 - 2018 : photo du plafond à l’achat de la maison


2024 : photo du plafond à l’issue du dégagement des peintures d’époque


2024 : photo du plafond à la fin des travaux de restauration

Mention ex aequo : restauration d’une devanture Art Déco pour la librairie Schaerbook

Avenue Léon Mahillon 91
Maîtres d’ouvrage : Christine Otten, Laurent Swinnens et Laurence Collignon

Le lieu :
Cette devanture commerciale est reprise dans immeuble de style Art Déco sis à l’angle des avenues du Diamant et Mahillon. Il est signé et millésimé sur le soubassement « G. Hebbelynck / archte S.C.A.B. 1926». Sa façade en briques rouges, rehaussée de simili-pierre blanche et de pierre blanche, de quatre niveaux sous toiture mansardée, a fait l’objet d’un nettoyage il y a quelques années. La devanture commerciale n’avait pas fait l’objet d’une restauration et avait donc conservé ses éléments décoratifs d’origine (vitraux, mosaïques, granitos…).

Le commerce semble avoir à l’origine hébergé une boucherie/charcuterie (d’après les plans d’époque avec des pièces prévues en sous-sol pour les frigos, les salaisons et le fumage). Il a également abrité ensuite un magasin de fleurs en papier pour terminer dernièrement en night shop peu esthétique. L’ensemble de l’immeuble a fait l’objet d’une complète rénovation en 2021-22 par l’entreprise BDP à l’exception du commerce. L’immeuble a ensuite été revendu par lots séparés. Malheureusement les vitraux des fenêtres, aux étages, n’ont pas été conservés lors du renouvellement des châssis.

La restauration :
Deux amies d’enfance, Laurence et Christine décident de se lancer dans la réalisation d’un rêve commun : l’ouverture d’une librairie indépendante. Le choix du local et sa localisation sont des éléments centraux du projet et elles décident rapidement de devenir ensemble propriétaires d’un bien qui pourrait abriter leur magasin et qu’elles pourraient rénover selon leurs goûts. Très rapidement, elles sont tombées sous le charme d’un bâtiment Art Déco dont le rez-de-chaussée, très vétuste, laissait néanmoins présager la présence d’un véritable bijou après rénovation. Elles font confiance à quelques corps de métier (si possible locaux) pour la rénovation de cette librairie qui a ouvert ses portes le 11 octobre 2024.

Les grilles, les ferronneries, les vitraux et le granito étaient en fort mauvais état.

La première démarche a été de trouver un artisan ferronnier capable de rénover les ferronneries et les grilles. Celles-ci ont donc été enlevées, mises dans des bains, galvanisées puis peintes. Après grattage des différentes couches de peinture, l’artisan a pu déterminer que la peinture d’origine des grilles semblait être verte. Il fallait également changer les châssis des vitrines et les faire refaire sur mesure, à l’identique, dans le matériau d’origine : le métal. Cette intervention a permis de placer du double vitrage. Les granitos, vitraux, boiseries ont également été restaurés.

Artisans et entreprises impliqués dans le projet :

Le point de vue du jury :
C’est un projet fédérateur car il apporte du patrimoine pour tous, pour la collectivité. Le bien n’est pas classé les propriétaires n’étaient pas contraints de faire l’effort dans cette mesure mais ils l’ont fait. Ils ont poussé la réflexion assez loin, par exemple : reproduction du logo de la librairie dans les soupiraux qui ont dû être refaits (c’est discret et subtil). Projet porté par des personnes dont le patrimoine n’est pas le métier, ce qui est louable.

Mention ex aequo : « Maréchal Foch s’éveille – restauration de façade »

Avenue Maréchal Foch 31
Maîtres d’ouvrage : Aurore Burette et Hadrien Bourdon

Le lieu :
Il s’agit d’une grande maison unifamiliale construite en 1895, pleine période du style néoclassique à Bruxelles, qui forme un ensemble cohérent et homogène avec l’ensemble des autres façades de l’avenue Maréchal Foch. Bien qu’ayant été modifiée en 1955 (l’enduit en façade a été remplacé par une brique de parement et un garage a remplacé le jour de cave), la façade a conservé tous les éléments stylistiques permettant de la replacer dans le contexte architectural de la fin du XIXème siècle. Malheureusement peu entretenue mais heureusement peu modifiée par ses précédents propriétaires, la maison nécessitait une restauration.

La restauration :
Afin que la maison recouvre sa pleine identité et soit valorisée par une restauration qualitative, les propriétaires ont fait appel à des corps de métier différents, chacun spécialisé dans un domaine particulier. Un cahier des charges succinct a été transmis aux différentes entreprises avant le démarrage de chaque opération.

Avant la restauration, la propriétaire, architecte spécialisée dans le patrimoine, a effectué une étude historique préalable à toute restauration réfléchie.

Le chantier s’est déroulé en plusieurs étapes :

  • nettoyage de la façade (revêtement en pierre bleue, brique) et sablage du balcon en fer forgé ;
  • restitution des châssis disparus ;
  • restauration des portes d’entrée et de garage et corniche.

La porte d’entrée d’origine a fait l’objet d’une restauration dans les règles de l’art et a permis son renforcement car elle avait été fragilisée par le vandalisme. Ont été intégrés : un système de serrure performant, des joints d’étanchéité et un bas de porte automatique (pour contrer les pertes de chaleur). La plaque de la boîte aux lettres a été restaurée et replacée.

Lors de l’acquisition de la maison, tous les châssis étaient en PVC blanc et extrêmement vétustes. Ils ont été remplacés par des châssis en chêne aux profilés de menuiseries anciennes, répondant aux normes énergétiques en vigueur, peints dans un vert clair proche de la couleur retrouvée sur la porte d’entrée. Les anciens volets en PVC ont été remplacés par des volets acier de même teinte que les châssis.

La porte de garage a été renforcée et isolée.

La restauration de la corniche néoclassique a également fait l’objet d’un travail minutieux.

Corps de métier impliqués dans la restauration :

  • Chantier sous la supervision de Aurore Burette, architecte
  • Nettoyage de la façade : Le Peintre SPRL
  • Châssis en bois : ATFJ Fabian & Baudouin Jadoul
  • Restauration des portes et corniches : Au Fil des essences - Gérard Tancrède

Le point de vue du jury :
Dossier de restauration solide. Méritoire d’avoir refait les châssis à l’ancienne avec réponse sécuritaire. Méthodologie pointue, similaire à celle développée pour un bâtiment classé.

 
 

Avenue Maréchal Foch 31, avant et après travaux.

Catégorie : Associations qui développent des projets de sensibilisation et de mise en valeur du patrimoine de Schaerbeek

Prix à l’association l’ARAU – Atelier de recherches et d’actions urbaine pour la Carte exploratoire Habiter Schaerbeek

Cette carte exploratoire est destinée à présenter le riche patrimoine du logement ouvrier, social, et des cités-jardins de Schaerbeek. Elle fait partie d’une série de trois cartes (les deux autres couvrant le quartier des Marolles, et la commune de Molenbeek), éditées par l’ARAU à la fin de l’année 2023.

L’objectif de ces cartes exploratoires est de rendre visible et lisible l’importance de la production architecturale et urbanistique concernant le logement modeste à Bruxelles, du logement ouvrier du XIXème siècle jusqu’aux productions contemporaines, en passant par les lotissements sociaux des années 1980, sans oublier le patrimoine exceptionnel des cités-jardins. L’idée est aussi de dépasser les idées reçues sur le logement accessible (« logement social = barres insalubres »), ou, en d’autres termes, de changer le regard sur celui-ci. Concrètement, ces cartes présentent, sur une première face, un plan reprenant les différents ensembles, et, sur la seconde face, une ligne du temps permettant de situer les phénomènes, événements, notions, lois etc., relatifs au sujet abordé. Le tout s’accompagne d’une série de notices décrivant certains des ensembles, retraçant l’histoire de l’une ou l’autre société de logement, ainsi que l’histoire des quartiers concernés ou la biographie d’un architecte.

La carte « Habiter Schaerbeek » se concentre sur les réalisations du Foyer Schaerbeekois, mais reprend aussi d’autres ensembles de logements antérieurs, ou étant passés, depuis leur construction, entre les mains du privé. Pour des raisons pratiques, l’entièreté de la commune n’a pu être couverte : la carte est principalement centrée sur les ensembles des quartiers situés au-delà des boulevards de Grande Ceinture. L’ARAU souhaiterait réaliser prochainement une seconde carte, centrée cette fois sur le centre historique de la commune.

Coté carte, les notices explicatives sont consacrées à :

  • La Cité Terdelt
  • Le complexe de logements de la chaussée de Haecht – rue de l’Agriculture – rue Marbotin

Côté ligne du temps, elles retracent :

  • L’histoire du Foyer Schaerbeekois
  • L’œuvre d’Henri Jacobs
  • La grande misère du logement ouvrier (texte commun aux trois cartes)

Plus d’informations

Le point de vue du jury :
La carte développée par l’ARAU a le mérite de mettre en avant un patrimoine pas suffisamment valorisé, celui du logement social.


La carte « Habiter Schaerbeek » de l’ARAU